L’indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse
Lettre d'information - juin 2018
L’ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 a réformé les règles d’indemnisation des licenciements sans cause réelle et sérieuse. En complément, elle a modifié également les règles applicables à la réparation de certaines irrégularités et de la nullité de la rupture. Ces mesures concernent les licenciements prononcés depuis le 24 septembre 2017.
L’application aux licenciements sans cause réelle et sérieuse
Il est possible pour chaque salarié licencié de contester la validité du motif de son licenciement et de réclamer une indemnité au titre du préjudice résultant de l’absence de cause réelle et sérieuse. Il faut rappeler que pour être justifié légalement, tout licenciement doit reposer sur des faits réels et suffisamment graves.
Il appartenait jusqu’alors au juge de déterminer le montant de l’indemnité due au salarié en compensation du préjudice subi, sans que l’employeur ne connaisse à l’avance une estimation de ce montant. Avec le temps, une jurisprudence fournie permettait d’aiguiller les juges et de donner une indication à l’employeur, sans pour autant assurer un montant défini.
L’apport de l’ordonnance
Un barème d’indemnisation obligatoire s’impose désormais au juge en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Ainsi, en cas de litige, si l’employeur ou le salarié refuse la réintégration de l’entreprise (qui reste une possibilité si le juge reconnait que le licenciement n’est pas fondé), le juge doit accorder au salarié une indemnité dont le montant dépend de son ancienneté.
Dans une entreprise de plus de 11 salariés, le barème prévoit une fourchette d’indemnités selon le nombre d’années d’ancienneté, le juge conservant son pouvoir d’appréciation (âge du salarié, employabilité, compétences…). L’article L.1235-3 du Code du travail détaille le barème dont les montants sont exprimés en mois de salaire brut. Citons pour exemple :
– 2 ans d’ancienneté : indemnité minimale de 3 mois, maximale de 3,5 mois
– 10 ans d’ancienneté : indemnité minimale de 3 mois, maximale de 10 mois
– 20 ans d’ancienneté : indemnité minimale de 3 mois, maximale de 15,5 mois
– 30 ans d’ancienneté et au-delà : indemnité minimale de 3 mois, maximale de 20 mois
Dans les entreprises de moins de 11 salariés, seuls les minimas sont modifiés, pour les 10 premières années d’ancienneté, s’échelonnant de 0,5 mois (jusqu’à 2 ans d’ancienneté) à 2,5 mois (10 ans d’ancienneté).
Faute de précision légale et réglementaire, la méthode de calcul du salaire brut de référence demeure inconnue. Il semble raisonnable de penser que le juge retiendra une moyenne des derniers salaires versés, afin de prendre en compte les éventuelles primes versées au salarié sur une période donnée.
Le cumul d’indemnités
Dans la limite des montants maximaux fixés par le barème, l’indemnité de licenciement pourra se cumuler avec d’autres indemnités prévues en cas de violation de règles applicables aux licenciements pour motif économique, telles que :
– l’indemnité en fonction du préjudice subi en cas de non-respect par l’employeur des procédures de consultation des représentants du personnel ou d’information de l’autorité administrative (art. L.1235-12 du Code du travail),
– l’indemnité minimale d’un mois de salaire en cas de non-respect de la priorité de réembauchage (art. L.1235-13 du Code du travail),
– l’indemnité minimale d’un mois de salaire en l’absence de représentants du personnel alors que l’entreprise est assujettie à cette obligation et qu’aucun procès-verbal de carence n’a été établi (art. L.1235-15 du code du travail).
Par ailleurs, une jurisprudence constante de la Cour de cassation précise que le juge peut décider l’attribution de dommages et intérêts complémentaires à l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, lorsque le salarié est licencié dans des conditions brutales ou vexatoires. Les dommages et intérêts devraient pouvoir se cumuler avec l’indemnité de licenciement prévue par le barème.
La nullité du licenciement
Les barèmes prévus par l’ordonnance ne trouvent pas à s’appliquer lorsque le juge constate que le licenciement est nul. Dans ce cas, le salarié peut prétendre à une indemnité au moins égale aux salaires des 6 derniers mois.
Un licenciement est considéré comme nul lorsqu’il est prononcé à l’encontre d’un salarié ayant notamment :
– subi ou dénoncé des agissements de harcèlement, moral ou sexuel,
– subi ou intenté une action en justice suite à une discrimination,
– intenté une action en justice en matière d’égalité professionnelle entre hommes et femmes,
– dénoncé un crime ou un délit.
Nous restons à votre disposition pour tout renseignement complémentaire relatif à la présente lettre d’information ou à tout autre sujet d’ordre comptable, social, fiscal ou juridique.