La clause de non-concurrence
Lettre d'information - juillet 2016
En principe, à l’issue de la rupture d’un contrat de travail, le salarié est libre de travailler chez un autre employeur, sans toutefois pouvoir agir de façon déloyale. Par exception, le salarié peut être lié par une clause de non-concurrence qui entrave ainsi le libre exercice de sa nouvelle activité. Trois jurisprudences récentes sont venues préciser les conséquences de la nullité d’une telle clause.
La clause de non-concurrence : principes et conditions de validité
La clause peut être conclue dès la conclusion du contrat de travail initial, ou ultérieurement, par avenant. Elle doit nécessairement résulter d’un écrit. Si le contrat de travail n’en fait pas mention, elle peut résulter d’une convention collective si elle s’impose et si le salarié en a été informé lors de son embauche (Cass. soc. 08/01/1997).
Pour être valide, la clause doit répondre à 4 conditions cumulatives qui ont été définies par la jurisprudence. Elle doit être :
– indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise (ex : un serveur en contact avec la clientèle, le chef d’une agence de voyage…),
– limitée dans le temps,
– limitée dans l’espace,
– rémunérée.
Une clause illimitée dans le temps, ou d’une durée excessive au regard de la nature de l’emploi, peut être jugée illicite, de même qu’une clause interdisant une activité sur un territoire trop vaste. D’une manière générale, le juge s’attache à vérifier l’applicabilité de la clause au regard des impératifs de l’entreprise et de la liberté du salarié. Il ne s’agit pas de priver le salarié de tout emploi et de faire échec au principe de liberté du travail.
La contrepartie financière ne peut pas être dérisoire. Elle est généralement proportionnelle au salaire de l’employé et à la durée de la durée de l’interdiction de concurrence. Elle n’est versée qu’en cas de mise en œuvre de la clause et ne doit pas varier selon le mode de rupture du contrat de travail (Cass. Soc. 14/04/2016).
Il convient d’être particulièrement vigilant à la rédaction de la clause, puisque l’employeur ne peut pas décider unilatéralement d’y renoncer si le contrat ne le prévoit pas. Ainsi l’employeur souhaitant dispenser le salarié de son obligation de non-concurrence, alors que le contrat ou la convention collective ne prévoient pas une telle possibilité de dispense, peut voir le salarié exiger son application.
L’illicéité et la nullité de la clause de non-concurrence
En présence d’une clause ne répondant pas aux critères jurisprudentiels détaillés ci-dessus, le juge sanctionne l’illicéité de la clause par une nullité. Jusqu’alors, le juge estimait à ce titre que la nullité de la clause causait un préjudice au salarié.
La réparation de ce préjudice était alors automatique, que le salarié respecte ou non la clause de non-concurrence à l’issue de son contrat de travail. Le montant des dommages-intérêts variait cependant selon le respect ou non de la clause.
Apports jurisprudentiels récents
Dans un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 13/04/2016, le juge est revenu sur les décisions antérieures, marquant ainsi un véritable revirement de jurisprudence. Le salarié ne peut plus se prévaloir d’un préjudice de principe comme c’était le cas auparavant. Il lui appartiendra désormais de démontrer l’existence d’un préjudice résultant de la nullité de la clause.
Si cette éventualité est possible dans le cas où le salarié respecte la clause, il semble difficile pour le salarié de se prévaloir de la nullité de la clause s’il ne l’a pas respectée à l’issue de la rupture de son contrat de travail.
Dans un deuxième arrêt du 17/05/2016, puis dans un troisième du 25/05/2016, tous les deux rendus par la chambre sociale de la Cour de cassation, le juge a confirmé que l’existence du préjudice ainsi que son évaluation ne relèvent que du pouvoir souverain du juge.
En l’espèce, le juge a estimé que le salarié ayant repris une activité concurrente de celle de son ancien employeur, sans respecter la clause de non-concurrence, certes illicite, ne peut se prévaloir d’un préjudice résultant, par définition, de la nullité de la clause.
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