Le compte personnel de prévention de la pénibilité
Lettre d'information - Décembre 2014
Plusieurs décrets en date du 9 octobre 2014 sont venus préciser les modalités d’application de la loi du 20 janvier 2014 visant à garantir l’avenir et la justice du système de retraites en instaurant notamment un compte personnel de prévention de la pénibilité, applicable à compter du 1er janvier 2015.
Le contexte
Bien qu’il existe déjà diverses mesures permettant à certains salariés de prendre leur retraite par anticipation (handicap, invalidité, travailleurs de l’amiante…), les fortes différences d’espérance de vie entre catégories socio-professionnelles ont conduit le législateur à adopter les lois du 9 novembre 2010 et du 24 janvier 2014 afin de prendre en compte la pénibilité au travail. Le compte personnel de prévention de la pénibilité permettra ainsi au salarié d’obtenir des points en fonction de la rudesse de son travail qui pourront être utilisés pour une formation, un passage à temps partiel ou une retraite anticipée (dans la limite de 10 trimestres). Selon les études publiées, entre 20 % et 40 % des salariés du privé seraient exposés aux facteurs de pénibilité retenus par ces décrets.
Les 10 facteurs de pénibilité
• 4 facteurs seront applicables en 2015 :
– le travail de nuit : au moins 1 h de travail entre minuit et 5 h, pendant au moins 120 nuits / an,
– l’activité exercée en milieu hyperbare : au moins 60 interventions à partir de 1 200 hectopascals,
– le travail en équipes successives tournantes : au moins 1 h de travail entre minuit et 5 h, pendant au moins 50 nuits / an,
– le travail répétitif caractérisé par la répétition d’un même geste, à une cadence contrainte, avec un temps de cycle de moins d’une minute pendant plus de 900 h / an ou de plus d’une minute mais comprenant au moins de 30 actions techniques par minute.
• 6 facteurs supplémentaires seront applicables en 2016 :
– les manutentions manuelles de charges lourdes : lever ou porter 15 kg, pousser ou tirer une charge de 250 kg, se déplacer avec une charge d’au moins 10 kg ou la prendre au sol ou à une hauteur située au-dessus des épaules, le tout pendant au moins 600 h / an,
– le travail à des températures extrêmes : température ≤ 5 °C ou ≥ 30 °C pendant au moins 900 h / an,
– le travail dans le bruit : au moins 80 décibels sur une période de 8 heures, au moins 600 h / an ou exposition à un niveau de pression acoustique de crête au moins égal à 135 décibels au moins 120 fois / an,
– le travail dans des postures pénibles : maintien des bras en l’air, positions accroupies, torse fléchi à 45°…pendant au moins 900 h / an,
– le travail soumis à des vibrations mécaniques : transmises aux mains et aux bras ou au corps, sur une période de référence de 8 heures, et de 2,5 m/S2 ou de 0,5 m/S2, pendant au moins 450 h / an,
– le travail au contact d’agents chimiques dangereux : eux-mêmes définis par arrêté selon leur type de pénétration, de classe d’émission, du procédé d’utilisation…
L’acquisition des points
Une année civile d’exposition aux risques précités entraine l’acquisition de 4 points (8 points si plusieurs risques se cumulent). Le compte personnel sera plafonné à 100 points. 10 points pourront par exemple servir à générer un complément de rémunération pour compenser pendant 3 mois une réduction de 50 % du temps de travail ou ouvrir droit à 1 trimestre de majoration de la durée d’assurance vieillesse, ou encore financer des actions de formation afin d’accéder à un emploi moins exposé à la pénibilité.
Les obligations de l’employeur
L’employeur devra d’une part, identifier les salariés concernés et d’autre part, participer au financement et à la gestion du compte pénibilité.
Il appartiendra à l’employeur de déclarer auprès de la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse des Travailleurs Salariés (CNAVTS) et le réseau des organismes régionaux (CARSAT, MSA, CNAV) les risques auxquels sont exposés les salariés via la Déclaration Annuelle des Données Sociales (DADS), au plus tard le 31 janvier de chaque année.
Le financement sera assuré par une cotisation patronale, due dès 2017 par tous les employeurs et qui représentera 0,01 % de la masse salariale.
Une cotisation patronale spécifique sera due au titre des salariés exposés à la pénibilité : elle sera de 0,1 % en 2015 et 2016 et de 0,2 % à compter de 2017. Elle sera doublée en cas de poly-expositions.
Le contrôle de l’administration et les sanctions applicables
Les caisses (CNAVTS, CARSAT, MAS, CNAV) pourront procéder à des contrôles afin de vérifier l’existence et l’ampleur des facteurs de pénibilité. Le contrôle pourra porter sur les 5 années civiles précédentes.
En cas de redressement, la caisse régularisera le nombre de points non affectés et une sanction financière allant jusqu’à 50 % du plafond mensuel de la sécurité sociale pourra être appliquée par salarié, soit 1 585 euros en 2015.
Le salarié pourra contester les déclarations de l’employeur, pour les 3 années civiles précédentes. En cas de refus de l’employeur, le salarié pourra alors saisir la caisse compétente. De plus, le salarié pourra également envisager d’intenter une action en responsabilité afin d’obtenir des dommages-intérêts.
Les obligations connexes
Les employeurs doivent établir une fiche individuelle de suivi pour chaque salarié exposé à un facteur de pénibilité depuis le 1er janvier 2012. A compter de 2015, l’employeur devra remettre cette fiche au salarié le 31 janvier de l’année suivant l’exposition aux risques précités.
Le document unique d’évaluation des risques professionnels actuellement obligatoire dans toutes les entreprises, devra présenter en annexe, à compter de 2015, les données collectives utiles à l’évaluation des expositions individuelles aux facteurs de risque ainsi que la proportion de salariés exposés aux facteurs de risques.
Nous restons à votre disposition pour tout renseignement complémentaire relatif à la présente lettre d’information ou à tout autre sujet d’ordre comptable, social, fiscal ou juridique.